Les Cht’ites infirmières

900,00 

Acrylique sur toile
50 x 150 cm

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Description

Quand j’ai peint les Cht’ites infirmières, elles n’étaient pas encore les héroïnes du COVID, mais elles avaient déjà leur charme. Prenons Chantal, qui, avec son air de diva, arbore bijoux et maquillage comme si elle allait fouler le tapis rouge plutôt que les couloirs de l’hôpital. Refusant la blouse blanche à liseré vert, trop banale à son goût, elle lui préfère la blouse jetable violette, réservée aux remplaçantes. Chère institution, pauvre budget ! Peu importe, Chantal se distingue, violacée de la tête aux pieds. Chaque jour, je tente, avec une diplomatie de plus en plus vacillante, de lui faire entendre raison. Mais rien n’y fait, elle reste fermement attachée à son violet seyant. Et il faut admettre qu’elle est la seule que l’on remarque parmi les autres soignantes affairées, qui piquent, transportent des patients et assistent les chirurgiens avec une efficacité redoutable.

Tiens, Chantal semble avoir un faible pour l’un de ces chirurgiens… Mais n’allez pas croire que je nourris des préjugés ! Certes, il y a de tout parmi les soignantes, mais le plus souvent, leur vocation est bien réelle, soigner et apaiser. Pendant la pandémie, elles ont mérité les applaudissements de tout un pays, de tous les pays. Mais il suffit d’une Chantal pour alimenter le propos, n’est-ce pas ?

Cachée dans ce monde coloré, la citation de Sénèque. J’aime voir les visiteurs essayer de la déchiffrer, et peut-être se poser la question de sa place dans ce tableau hospitalier. « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, mais parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles. » Cette citation résonne profondément avec le monde hospitalier que j’ai arpenté pendant trente ans. Elle évoque les combats silencieux et les douleurs muettes qui se cachent derrière chaque porte de chambres, chaque rideau de bloc opératoire. Souvent, je n’ai pas osé dénoncer les maltraitances, les violences institutionnelles, les violations des droits humains. L’omerta était systémique, un voile oppressant qui étouffait mes cris de détresse et de révolte. La citation de Sénèque devient un rappel poignant de notre manque de courage individuel et collectif. Tant de soignants, pris dans les engrenages d’un système déshumanisé, deviennent instruments de ces violences sur les patients. D’autres l’exercent gratuitement et ne seront pas punis.

La qualité, pour les pouvoirs publics hospitaliers, n’est souvent qu’une façade, une cerise sur le gâteau qui permet d’obtenir des subventions. On ne la travaille que quelques mois avant une certification, on la falsifie.

J’aurais voulu être dans l’époque d’aujourd’hui où les « me too » se soulèvent. Peut-être aurais-je alors trouvé la force de briser le silence, de mettre en lumière ces abus cachés. Mais parfois, l’art et les mots peuvent accomplir ce que l’acte seul n’ose pas. En cachant la citation de Sénèque dans ce tableau, j’espère éveiller les consciences, inspirer le courage de dénoncer, de changer ce qui doit l’être.

Informations complémentaires

Poids 6 kg
Dimensions 150 × 3 × 50 cm